Trois ans après la mort de Daphne Caruana Galizia, devenue une icône de la lutte anticorruption dans le plus petit Etat de l’Union européenne, que sortira-t-il de cet imbroglio, entre preuves et dénis, dans un Etat miné jusqu’à son sommet par l’argent et la corruption ? Le pire n’est jamais sûr, mais le droit maltais pourrait réserver quelques surprises. Le fait d’aider une ou plusieurs personnes à se dégager d’accusations de meurtre, en effaçant toutes traces, ne constitue pas un délit pénal sur l’île. Nul ne peut donc dire à quoi aboutira la procédure judiciaire en cours. C’est d’ailleurs dans ce contexte d’incertitude, avec la peur que jamais la vérité ne sorte, que la famille de la journaliste et blogueuse a créé une fondation en sa mémoire. La Daphne Caruana Galizia Foundation vise à autant à l’honorer, qu’à mettre la pression sur les institutions maltaises.

« Si je devais laisser l’enquête seulement aux mains de la police et du procureur, ça ne mènerait nulle part, déclare son fils aîné Matthew, qui a repris le lourd flambeau de la lutte anticorruption porté par sa mère et se démène pour faire la lumière sur son assassinat. Nous devons nous battre pour obtenir justice, pour le meurtre de ma mère mais aussi contre la corruption, qui en est à l’origine. On pourrait penser que la police fait son travail mais ce n’est pas le cas, il faut constamment la surveiller. »

Les autorités maltaise ont ,par exemple, mis plus d’un an à arrêter Melvin Theuma, affirmant avoir des difficultés à trouver des preuves contre lui. Selon plusieurs sources concordantes Europol, frustré par l’inaction de la police maltaise, a dû menacé de se retirer de l’enquête, si l’intermédiaire n’était pas arrêté. Europol ne souhaite pas commenter cette information mais rappelle « qu’elle a consacré des centaines de jours de travail » et continue à être activement impliquée dans cette enquête.

Un énième rebondissement tragique vient à présent menacer l’issue de la procédure judiciaire. A la mi-juillet, Melvin Theuma, le repenti sur lequel repose une bonne partie du dossier, a tenté de se tuer en se tranchant la gorge. Il a été retrouvé, baignant dans son sang, la gorge lacérée et l’abdomen percé par plusieurs coups de couteaux. Bien qu’il était dans une maison sécurisée et sous protection policière, et qu’il devait à nouveau témoigner le lendemain, des sources concordantes affirment qu’il s’agit d’un suicide, évoquant sa fragilité psychologique, sous la pression des récents développements, et ses pulsions suicidaires. Ses cordes vocales sont atteintes. Nul ne sait quand il pourra reparler et revenir à la barre s’expliquer sur les derniers enregistrements versés au dossier. Sur son lit d’hôpital, après avoir repris conscience, le chauffeur de taxi a tracé, des mêmes lettres capitales que ses aveux, un message sur une feuille de papier : « J’espère que les enfants de Daphne me pardonneront. »